jeudi 1 juin 2023

Le coût des sentiments

Taleb Alrefai est né au koweit en 1958. Enseignant en écriture créative à l’Université Américaine de Koweit, il occupe dans le même temps un poste de responsabilité au Conseil national de la culture, des arts et des lettres du ministère de l’Information. C’est également un journaliste et un auteur prolifique dont les textes portent un regard situé sur la société koweitienne. La douzaine de romans et recueils de nouvelles expriment son souhait de «donner une vraie image du pays», car selon lui c’est le rôle de la littérature de dessiner avec vérité et authenticité l’état présent de la société. 

Son dernier roman «Les portes du paradis» nous invite à découvrir une histoire captivante jusqu’à la dernière page, narrée par ses personnages principaux. Chapitre après chapitre, l’univers des uns et des autres s’ouvrent à nous avec leurs voix singulières.

Yacoub, un homme d’affaires d’une soixantaine d’année passe le plus clair de son temps à la gestion de son business. Voyages, transactions financières, signature de contrats absorbent toute l’attention de cet homme dont la mission est d’assurer une vie confortable et prospère à sa famille. Il envisage de transmettre son empire à son fils préféré Ahmed qui ne le voit pas de cet œil. Introverti et mystérieux, celui-ci a des ambitions qui sont aux antipodes de celles de son père. Il veut aller en Syrie combattre aux côtés de ses «frères d’arme».

lundi 10 avril 2023

Y a-t-il encore un ailleurs ?

Durant les révolutions arabes, le narrateur de ce roman, un Égyptien
copte vivant à Londres, reçoit un jour l’appel de son ami du Caire qui lui demande d’organiser les funérailles d’un jeune Syrien dont la famille réfugiée en Égypte n’a pas été autorisée à faire le voyage pour l’enterrer. Il y consent non sans peine, car qu’y a-t-il de plus triste pour un étranger que de mourir loin des siens, sans aucune présence clémente pour l’accompagner dans ce dernier voyage? «Si je ne pouvais rien pour les vivants, le moins que je puisse faire était de me rendre utile pour les morts.

Les damnés de la terre

Les vivants qu’il évoque sont le public qu’il accompagne dans son métier au sein d’une administration sociale. Ceux que la société rejette, que l’origine ethnique, géographique, la précarité et parfois les choix de vie relèguent à la marge d’un système conçu pour ne préserver que les privilèges d’une minorité. Avec ses collègues pour la plupart de provenances diverses, il est chargé d’enquêter auprès de populations prioritaires en vue d’octroi de logements sociaux.

samedi 4 février 2023

La mémoire du jasmin

Dans ce roman captivant et remarquablement traduit, Mansoura Ez-Eldin nous propose dans un aller-retour dans le temps et l’espace, entre le Caire et Basra (actuelle Bassorah en Irak), de rencontrer des personnages intemporels dans un récit qui mêle subtilement fiction et réalité historique.

Hishâm Khattab, jeune cairote, ingénieur en géologie au chômage, voue une passion ardente pour les manuscrits anciens. Il s’intéresse en particulier à l’histoire de l’islam et aux grands penseurs musulmans qui ont fondé ou nourri la réflexion théologique de divers courants tels que le soufisme, l’ibadisme, le kharijisme, le chiisme ou le mutazilisme.

À défaut de pouvoir vivre de son métier, il fait du commerce de livres anciens son gagne-pain. Un jour, dans l’attente du passage d’un convoi présidentiel, il aperçoit dans la foule une jeune femme, Mervat, tenant entre ses mains Le Grand Livre de l’interprétation des rêves attribué à l’imam Muhammad Ibn Sîrin, datant du VIIIe siècle. Intrigué par cette femme à laquelle il trouve une troublante ressemblance avec la muse et épouse de Marc Chagall, il l’aborde et de cette conversation naît une relation nourrie de leur passion commune pour l’art et la littérature.

jeudi 5 janvier 2023

Conversation avec l’absent

«Oublie ton nom, tu es le numéro 1858!» dit le geôlier à Mazen al-Hamada lors de son arrestation. Dans l’usine de la mort qu’est la prison syrienne, cette phrase glaçante préfigurait du sort qui l’attendait, lui qui n’était plus qu’un nombre de plus dans la longue chaîne de l’abattoir.

Mazen al-Hamada, un jeune homme de Deir Ezzor, issu d’une famille nombreuse, aimante et politisée, s’était comme beaucoup de jeunes de son pays engagé avec espoir dans la révolution syrienne. Arrêté, cruellement torturé et violé, il finit par prendre la route de l’exil qui le mènera après maintes péripéties aux Pays-Bas.

Résolu à parcourir le monde et témoigner de l’horreur vécue, Mazen a livré des heures de narration à la journaliste Garance Le Caisne, autrice du livre documentaire à la renommée internationale Opération César, Au cœur de la machine de mort syrienne.